Laurent, en soaring sur la côte, part en cross (Plouezec/Guingamp)

Laurent, en soaring sur la côte, part en cross (Plouezec/Guingamp)

Laurent Guérin a vécu un moment rare sur la côte Nord de la Bretagne. En effet, volant en soaring sur la côte, il a réussi à s'extraire pour faire un vrai vol de plaine avec plafond dépassant les 1100 m. Si ce n'est pas la première fois que des pilotes parviennent à quitter la côte* depuis le site Milepat à Plouezec , on peut envier ce pilote qui a dû vivre un moment fort. Voici son récit de son vol depuis la côte costarmoricaine
* Sylvain Bobo a déjà fait un vol de 86 km sur ce site. D’autres vols sans partir de la côte : celui de Philippe Le Campion, vol de 88 km depuis Ploeuc sur Lié et celui de Franck Arnaud, 230 km en départ au treuil à Sougeal (35)

Le chaudron magique

Plouézec “launch zone” : j‘ai volé au pays du thermique magique

C’était le 3 mai. Quand je prends la route, je ne sais pas encore où aller voler. J’hésite à me rendre à St Marc d’Ouilly car le vent est vraiment dans le secteur N voire NNO. J’hésite tellement que je fais un point au rond point du Mac Do de Lamballe. J’abandonne, trop de doute, et il est déjà près de 10 h. Je change mes plans et je prends la route dans l’autre sens direction Plouézec.

Quand j’arrive au MilEtpat, un pilote est déjà là, Erwan, mais les conditions sont très faibles. Le temps de le saluer et il part pour un plouf, ça promet. Le temps qu’il remonte, le vent c’est légèrement renforcé et Erwan remet ça, cette fois ça tient un peu. Je l’accompagne, il n’est pas 12h, on voletouille gentiment. Philippe D viens nous rejoindre et nous prospectons vers Boulgueff. Erwan, plus aventurier va jouer dans l’anse de Beauport sans résultat. J’y fait une visite sans résultat non plus. Pour le moment le vol se résume à un soaring des familles, je commence à ranger mes idées de cross. Pourtant devant la ferme marine de Boulgeff des petits thermiques déclenchent, ça pourrait être encourageant mais un gros nuage vient couvrir la baie. Je me replie vers le MilEtpat et je vois Erwan qui continue inlassablement de prospecter devant Beauport.

Départ depuis le chaudron magique

Cela fait près d’une heure que je vole et toujours pas de départ en cross, de quoi désespérer. Le ciel reste bien chargé, surtout dans les terres mais une belle éclaircie se profile sur l’île de Bréhat. Dans le même temps, j’aperçois Erwan toujours accroché dans la pente à Beauport malgré qu’il soit à l’ombre. Là, ma réflexion est rapide : si ça tient encore à l’ombre, un bon gros soleil qui vient chauffer là dedans et ça pourrait être le bon coup. J’ai assez de gaz pour transiter dès maintenant, je passe devant la moulerie sans traîner et j’aborde l’anse de Beauport sans n’avoir ni rien gagné ni rien perdu, je suis à 100 m/mer.

Pull

102 m, oui, je ne suis pas bien haut. Je raccroche seulement la pente et, direct, je me fais cueillir. Je pensais devoir me placer et attendre un cycle… Non, non, non, le billet de sortie, c’est maintenant. Un tour, deux tours, trois, je vois Erwan qui a bien compris qu’il se passait quelque chose mais il s’enterre dans le vallon derrière Beauport. Je crains de décaler trop vite et, à 250 m, je me dis qu’il vaut mieux revenir et attendre le prochain cycle, vers 200 m, ce serai plus “honnête”. Un bord avant et le vario continue de bipper, je ne peux pas lâcher ça!!! J’enroule et je laisse Erwan sur place qui continue à prospecter trop loin dans le fond du vallon.

Vue sur Plouézec depuis la ferme marine

J’enroule un bon thermique, j’analyse sa dérive, je regarde comment se profile les vaches en cas de faux départs, le vallon n’est pas attirant, mais l’ascendance est régulière et je n’ai pas trop de mal à la centrer. Je décale correctement et le nuage me donne très facilement la direction du thermique qui m’aspire. Passé les 500 m, je sais que le plaf est à peu près assuré. Je suis bien calé dans mon thermique maintenant j’en profite et à chaque tour, je jette mon regard vers Paimpol et sa baie. Je monte toujours et je contemple!

Un seul mot : MAGNIFIQUE

J’en profite un max tout en visant le plafond. J’y arrive rapidement. 11 minutes et je suis dans les barbules à 750m, on est en bord de mer, le plafond n’est pas énorme mais ça devrait s’améliorer dans les terres. Comme la flottabilité est bonne, je traîne un peu au plaf’ pour graver dans ma mémoire cette vue magique.

Moi, sous mon nuage, au dessus de la baie de Paimpol… What else !

Allez, je me reconcentre. cette dérive je ne la connais pas du tout, il va surtout falloir gérer les passages à l’ombre des gros pavés de nuages. Puis j’essaye de visualiser les déclenchements qui correspondraient à cette alternance soleil/ombre. D’une autre façon, les nuages sont de bons alliés et jouer à saute moutons entre eux c’est une très bonne option. Je fais un mix des deux, sol/nuage et ça marche, je dirais même mieux, ça vole! Il faut avouer que les ascendances sont franches.

Du gros vario

Après 7/8 km, je pense à ma dérive et je regarde la carte des espaces aériens. Là, il faut que je fasse quelque chose, la TMA Iroise 4 est à 600 m sur ma droite, je ne dois pas dépasser 750 m de plafond. Je raccroche l’ ascendance du nuage et vers 900 m je traverse sous le nuage pour chercher le bord au soleil et par la même occasion me recadrer vers un ciel un peu plus ouvert. Je me suis donné de la marge au départ et j’ai bien fait. Toute la traversée du nuage je monte en ligne droite et ça se renforce pour finir à 1120 m avec un vario qui bippe autour du +4 m/s durant une vingtaine de secondes (+5 m/s max durant quelques secondes ). Sous le nuage avec les barbules qui flottent à coté et en bordure du nuage… Comme me l’a écrit Manu : Le Kiff !!!

La vue sur la baie de St Brieuc est tout aussi magnifique mais je dois la quitter, ma dérive est plein Sud, direction Guingamp

Guingamp! Guingamp! 2 minutes d’arrêt! Correspondance pour Ploumagoar quai B!

Arrivé vers Goudelin, je retrouve un thermique, enfin soyons honnête, une buse m’indique où est le thermique et vient enrouler avec moi sur une centaine de mètres et une fois sur ma rampe de lancement elle me quitte. C’est là que j’appelle en radio pour essayer d’avoir le soutien de mes congénères terrestres, sans résultat. Comme c’est un coin que je ne survole jamais, je regarde sur XCsoar le patelin sur ma droite qui est St Agathon et en cliquant sur l’écran je vois que la TMA 3 est devenu la TMA Iroise 4 qui elle à un plafond autorisé à 1350 m, ça ouvre les champs des possibles. Je monte à 900 m mais je suis déjà dans les barbules, le plafond du jour serait redescendu? Je ne reste pas là et je pars vers l’Est de Guingamp et la 4 voies.

Temporisation et mauvaise option

Là, je sens que ça va être un gros morceau : ça fait près de 1h30 que je vole, je fais le point. Par où je passe?

D’abord, je m’accroche à l’ascendance du nuage qui passe à l’Est de Guingamp, ça c’est fait. je plafonne à 1000m dans les barbules. Je regarde le sol, j’aperçois des éoliennes vers Pabu qui tourne en ENE et je contrôle ma dérive depuis le départ. Mais je n’analyse pas la dérive de mon thermique qui elle est NO/SE. C’est là mon erreur ! Mais 3 km avant, j’étais dans un thermique NE/SO, alors comment accepter cette situation. Par manque de lucidité sur ce coup, je pars dans la dérive que j’ai eu depuis le début mais je pars à 90° du thermique.

C’est la pente fatale. je m’obstine à passer en bordure d’un bois, quand j’arrive à une hauteur où je dois prendre une décision je n’ai toujours rien touché. J’observe les environs, sur ma droite Ploumagoar, entre les deux une ligne THT, je passe au dessus car sur ma gauche c’est bien désert et la ligne pourra peut-être faire son effet. Rien, je n’ai pas bien préparé ma vache. Et d’ailleurs, en parlant de vache, je survole un gentil troupeau en final, quand elles me voient arriver avec ma bâche, elles s’agitent tellement qu’elles commencent à enjamber la clôture et trotter dans le jeune blé. Je pensais avoir mis assez de distance mais ce n’était pas suffisant. Autant dire que l’accueil des agriculteurs a été copieux. Désolé messieurs.

Posé au kilomètre 34, après 2 heures de vol

Une balade et une vue magique sur le Trégor et l’Argoat. J’ai su après qu’Erwan avait réussi à partir posant vers Pléhedel au kilomètre 8, son premier cross. Bravo!

Cette fois-çi, la récup’ a été plutôt sympa. Ploumagoar étant la patrie de Béné, elle a pris une grosse heure de son temps de travail pour me ramener à Plouézec. Merci Béné. Béné n’a pas oublié de me signifier que si un jour je décide de poser vers Limoges comme le recordman de France, ce ne sera pas la même ! “Compris ! Et interdiction de redécoller, non mais ! Maudit fugueur, on va pas aller te chercher partout comme ça !”

De toute façon, la prochaine fois, je me payerai le luxe de revenir par le train pour me refaire la séquence du “voyage à Paimpol”.

Laurent Guérin – laurentfly.over-blog.com

Le gros noir qui tirait tant et le ciel qui m’attendait devant

La trace sous Doarama, car elle retransmet pas trop mal la vue qu’on a de là haut. le cross ne démarre qu’à une heure, avant c’est un long soaring.

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DECOUVRIR

– voir le cross de Tim Pentraeh “Thermiques sur la côte Nord du Devon – 74 km (Cornouaille)”

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