Record de distance du Massif Central au départ du massif du Pilat (42)
Le récit de Jonathan Marin
Après un hiver qui n’en finissait plus, le printemps est enfin arrivé avec des conditions exceptionnelles. J’ai réussi, entre quelques journées de biplace, à profiter de cette météo incroyable.
Vendredi dernier (20 avril), j’ai décollé de chez moi, du massif du Pilat, de la Jasserie exactement. J’adore voler sur ces petites montagnes car elles sont techniques mais formatrices. Ici, pas de crêtes où le but est de pousser l’accélérateur le plus fort possible pour faire des kilomètres. La veille, je bossais en biplace pendant que les potes profitaient des conditions magiques pour battre le record de distance au départ du Massif. Bravo à toi Pascal Essertel pour ce beau vol de 131 km.
Il n’en fallait pas plus pour me motiver. Nous sommes donc plusieurs pilotes avec les dents qui rayent le parquet pour chasser ce nouveau record. La météo annonce une masse d’air parfaite avec un vent d’Est basculant SE. Nous décollons tout de même de la Jasserie qui est orientée Ouest. La tendance NO en basse couche le matin ne nous permet pas de partir de l’Oeillon en Est.
La sortie n’est pas très difficile
La sortie n’est pas très difficile même si nous n’arrivons pas à faire un gros plafond. La voie est ouverte dans la confluence qui part du Bessat en direction du Mont Mezenc. Les Vz sont bonnes tout de suite, il n’y a qu’à avancer de nuage en nuage. Au niveau de Dunières, je propose à Fred et Thierry de partir poussés par le vent. La confluence continue vers le sud mais la masse d’air semble s’humidifier comme annoncé. J’ai peur qu’avec plus d’humidité, il y ait de grandes zones d’ombre.Les kilomètres sont faciles jusqu’à Yssingeaux, mais une zone sans nuages se profile devant nous. Mes compagnons de vol temporisent, je décide de continuer d’avancer. Des barbules se forment, je trouve une belle Vz. Je vais donc continuer seul ce vol dans une zone que je n’ai jamais survolée ni jamais foulée.
Je laisse derrière moi les quelques agglomérations de la Haute-Loire pour continuer plein Ouest. Il est très rare d’avoir de l’Est ici, il faut en profiter. Les kilomètres défilent facilement avec ce petit vent arrière.
Un magnifique haut plateau s’offre à moi.
Un magnifique haut plateau s’offre à moi. Je reconnais sur ma gauche le Massif du Cantal qui me rappelle de bons souvenirs de 2006. Sur ma droite, j’aperçois un autre massif encore un peu enneigé. Ce doit être le Puy de Sancy. Je ne le connais que de nom. Derrière lui, se dresse le Puy de Dôme. Là encore, de bons souvenirs ressurgissent d’une compétition de 2008 à laquelle j’avais participé avec mon pote Antoine Tricou. La vue est magnifique mais je dois me concentrer. Devant moi se situe la TMA 4 de Clermont Ferrand. Le sol est haut et les basses couches moins généreuse en Vz. Je pourrais essayer de contourner par le sud mais l’air plus humide étale les cumulus et je serais moins poussé par le vent.
Je me retrouve bas
En avant donc sous cette TMA. Je garde une bonne marge en altitude tout en jettant un oeil sur mon téléphone aux cartes aéronautiques en ligne. Je passe un peu trop de temps sur le téléphone et je me retrouve bas. Ce n’est pas le bon endroit pour poser car ici, il n’y a que des prairies. Pas d’autoroute, pas de route, ni même de chemin… Un point bas à 160m/sol me fait perdre un peu de temps et de sueur. Quelques centaines de mètre plus haut, je suis obligé de faire des 360 dans le thermique qui est devenu bien large et bien puissant. Je m’échappe de cette colonne en furie pour foncer vers le prochain thermique… qui sera le dernier.
Me laisser porter, me laisser flotter
Je prends le temps de faire le plafond. Ce thermique est moins puissant, la convection est en baisse. Je quitte cette dernière ascendance un peu avant 18h. Je vais maintenant passer un peu plus d’une heure à me laisser glisser, me laisser porter, me laisser flotter dans cette masse d’air qui retrouve son calme. Sans refaire un virage, je m’en vais retrouver le sol. Je fais une vidéo live en l’air, je vois les réactions des copains qui m’aident à me rendre compte de ce rêve que je viens de réaliser. Je n’aurais jamais imaginé faire un tel vol au départ de mon petit Massif du Pilat que j’aime tant.
Perdu entre Limoges et Tulles, le retour ne sera pas simple
Il me faudra un peu de temps pour que mon esprit revienne lui aussi sur terre. La voile pliée, il me faut maintenant rentrer le plus rapidement possible pour faire voler mes passagers de demain. Perdu entre Limoges et Tulles, la tâche ne sera pas simple. Pour rentrer, je vais devoir me faire prendre en stop trois fois, profiter de la navette de Freedom parapente, prendre un covoiturage à 2h du matin, dormir dans le sac de mon Enzo dans un jardin public en attendant que le soleil se lève et enfin rentrer à la maison. Je peux enfin me glisser dans mon lit et dormir 1h30… avant de retourner voler en biplace et faire découvrir ma passion qui n’est pas prête de s’essouffler. Merci à Nicolas Treins, Henri Montel, un autre pilote Clermontois dont j’ai oublié le nom et enfin à David pour les derniers kilomètres en voiture.
Trois jours plus tard ( lundi 23 avril ), je vais encore pouvoir faire un vol incroyable au départ de St Hilaire du Touvet. Je vais effectuer le plus grand vol au départ de ce site mythique qui est aussi le plus grand triangle FAI au départ du département de l’Isère. Je vais prendre le temps dans les jours qui viennent de vous raconter cette autre incroyable journée.
Jonathan Marin