Conseils pour partir voler en parapente à El Hierro (Canaries)
Après avoir vu la superbe vidéo « Blown Land » de Théo de Blic, Tim Alongi et Harlod Pluvieux, après avoir discuté avec Florent Grafouillère, Ondrej Prochazka et Eric Varlet de leur expérience, l’île d’El Hierro, tout au bout des Canaries, était devenue pour moi une destination évidente ! – Antoine Charron
Avertissement pour pratiquer le parapente à El Hierro
Attention, El Hierro n’est pas une destination banale pour un parapentiste, et encore moins pour un parapentiste acrobate comme moi.
Tout d’abord, l’aérologie y est très particulière. Les vents dominants sont NE, comme sur tout l’archipel, mais ils viennent régulièrement s’enrouler autour de l’île et varient énormément en force et en direction sur les différentes parties d’El Hierro.
Par exemple, le jour de notre arrivée en ferry, la mer était démontée et le vent soufflai à plus de 70km/h à Valverde (Nord-est de l’île) et nous volions sous le vent de l’île à la Montaña de los Charcos (pointe ouest) dans 10-15km/h d’ouest et des bulles généreuses !
Aussi, le fameux nuage d’El Hierro, qui remplit le golfe principal de la Frontera, et l’effet de compression à l’approche des crêtes qui s’élèvent jusqu’à 1500 mètres, imposent d’être équipé d’un accélérateur et d’une boussole.
Un conseil : repérez bien les zones posables en bas avant de vous lancer
Enfin, El Hierro est une île volcanique formée par l’ancien cratère du volcan bouclier d’El Golfo, dont une bonne moitié s’est effondrée dans l’océan il y a plusieurs dizaines de milliers d’années. Du coup, oubliez les plages de sable fin, il n’y en a pas… ce qui limite les possibilités d’atterro de secours. Pas de décos herbeux non plus, mais plutôt des pierriers de roche basaltique assez agressive. Et entre les deux, des énormes scories, des cactus, et pas mal de poteaux électriques. Un conseil : repérez bien les zones posables en bas avant de vous lancer.
Une ambiance « bout du monde »
Pourtant, les bonnes raisons de survoler ces paysages hostiles ne manquent pas. El Hierro est la moins peuplée (10 000 habitants) et plus occidentale des îles de l’archipel des Canaries. Il y a assez peu de touristes et on a souvent l’impression d’être seul au monde. L’arrivée depuis l’aéroport ou le quai du ferry se fait par un long tunnel qui débouche sur un immense cirque, invisible jusqu’alors. On découvre une vaste plaine où la ville de la Frontera et sa chapelle surplombent les serres de bananiers et la côte de roche basaltique, noire et ciselée par l’océan en arches, orgues et piscines naturelles. En poursuivant vers l’ouest, vous passez le village de Sabinosa, perché à quelques centaines de mètres à flanc de volcan. Enfin, basculant derrière les dernières arêtes, le décor change radicalement : les forêts luxuriantes du parc de Mencafete qui grimpent le long du cratère d’El Golfo disparaissent pour laisser place à des plantations de cactus et à une steppe très clairsemée sur les flancs de petits cratères secondaires.
Le village de Sabinosa
S’ouvre alors la route pour la réserve naturelle d’El Pinar sur les flancs Sud de l’île avec ses immenses forêts de pins très bien entretenues. Les rapaces locaux enroulent les thermiques qui déclenchent dans les ravines de la face sud généreusement ensoleillée.
Après être passé en contrebas du point culminant d’El Hierro, le Pico de Malpaso à 1501mètres, vous prendrez la route cap au Nord-Est, vers Villa de Valverde. Nouveau changement de décor : des petits vallons herbeux bordés de murets en pierre qui délimitent les champs de moutons vous rappelleront les doux pâturages Anglais.
Mais si vous vous aventurez à pied vers le nord, vous serez rapidement en haut de l’arête d’El Golfo avec 1 000 mètres de vide sous les pieds ! De nombreux panoramas sont aménagés tout au long du trajet. En partant de Villa de Valverde, vous entrez à nouveau dans le tunnel et la boucle est bouclée.
La côte en roche basaltique
Voler en parapente à El Hierro
La voiture de location est un must pour pouvoir se rendre facilement sur les différents sites de vol. Les plus connus et les mieux aménagés se trouvent au-dessus de la Frontera, le long de la route pour les 600 m et 800 m (El Hierro Saida 800), et sur l’arête pour le fameux décollage de « Dos Hermanas ». Vous pouvez aussi décoller du Pico de Tenerife, juste au-dessus de Dos Hermanas, ou encore depuis le Pico de Malpaso si vous êtes assez en forme pour y monter à pied !
Plus à l’ouest, le décollage de Sabinosa, juste en dessous du cimetière, vous donnera accès au meilleur spot de l’île pour l’acro et un thermo-dynamique puissant vous propulsera à 5m/sec 800 m au-dessus du box.
Côté sud, j’ai pu trouver trois sites : la Montaña de los Charcos et Tacoron, très « minéraux », et Las Casas qui permet de survoler le petit cirque sauvage de Las Playas.
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Le site de Sabinosa (par Eric Varlet)
Une fois que vous avez compris comment gérer les dangers de ce site, c’est un endroit très intéressant pour s’entraîner à l’acro. Dans une bonne journée, vous pouvez enchaîner sans forcer jusqu’à 10 runs de 2mn30 par heure, ce qui est en fait le site le plus efficace que j’ai rencontré jusqu’à présent.
Bien utilisé, le box est très correct et la logistique est super simple, comme Organya avec décollage à côté de la voiture, et repose possible la plupart du temps (au pire, plusieurs posés possibles plus bas, et 150m de dénivelé à remonter, stop efficace).
Le plus gros danger viendra quand petit à petit on repousse les limites de ce qu’on appelle une journée volable… Il faut bien étudier les différences de force de vent en fonction de l’altitude, et météo blue est un outil fiable pour cela.
Voir la vidéo d’Eric Varlet
Découverte en vol d’une île des Canaries bien à part : El Hierro
Entre soaring et thermique, tous les types de vols sont possibles
Entre soaring et thermique, tous les types de vols sont possibles. Ondrej Prochazka a d’ailleurs publié un tuto cross très éclairant sur El Hierro (voir vidéo à droite) dans lequel il traverse l’île d’est en ouest depuis Sabinosa. Enfin, il y a le vol magique « on top », que je n’ai malheureusement pas pu expérimenter, qui part de Dos Hermanas et se termine à côté du stade de la Frontera (atterro officiel) en passant à travers la couche nuageuse, cap au Nord !
Analyse des conditions (par Eric Varlet)
El Hierro requiert de bonnes capacité d’analyse météo, en particulier des forces de vents afin d’éviter de se mettre inutilement en danger.
Il faut faire très attention aux différentes couches de vent, qui peuvent varier fortement. On peut se dire une fois rendu à Sabinosa que ça vole, avoir un 20km/h en bas, et se retrouver dans du 60 en haut, et finir par se faire reculer derrière la montagne, situation qui peut très mal finir. (Certains très bons pilotes se sont fait avoir… Ne négligez pas cette éventualité).
Ondrej Prochazka, qui vole beaucoup là bas et depuis plusieurs années, nous donne sa routine de check internet avant d’aller voler :
– Animation graphique, avec sélection des altitudes :
surface, +300m, +600m, +750m, +900m – www.windytv.com
- Une autre animation, avec sélection des altitudes :
Surface, +100, +1500 – earth.nullschool.net
- Un autre check des couches de vent, l’AIRgram de météo blue : www.meteoblue.com
Enfin, un peu d’observation en temps réel :
- Les mesures de l’aéroport ne sont pas si pertinentes mais selon les orientations, ça peut être intéressant : www.windfinder.com/report/hierro
- Une balise est située vers l’hôtel en bord de mer sous Sabinosa : www.aemet.es
Et enfin… N’oubliez pas d’amener avec vous un vraie boussole efficace car,là bas, il est très fréquent de se faire piéger par la formation parfois hyper rapide d’un nuage… Couplé à moins de 10 km/h de vitesse/sol, ça peut vite être la panique sans être sur de tenir un cap !
Accès à El Hierro
Le billet A/R Ryanair est à 90 €, mais l’avion s’arrête à Tenerife. Pour atteindre El Hierro, il faut prendre le ferry (Armas).
Bons plans hébergement
La plupart des pilotes qui viennent à El Hierro trouvent des chambres d’hôtes ou des appartements dans les environs de La Frontera. C’est facile d’en trouver sur Booking mais “Las Casitas appartamentos” à Las Puntas est top!
Conclusion
En une semaine, mon compagnon de vol et moi avons eu l’impression d’en découvrir beaucoup. Mais le potentiel de ce bijou au milieu de l’océan est énorme et vous laisse comme un goût de revenez-y ! J’y retournerai, c’est sûr