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Robert ne parvient pas à défaire la fermeture asymétrique qu’il a déclenchée

Robert ne parvient pas à défaire la fermeture asymétrique qu’il a déclenchée

Robert est un pilote tchèque qui vit actuellement au Vietnam. Il s’est rendu sur le site de Pokhara au Népal avec sa toute nouvelle voile BGD Cure qu’il a depuis peu (5 heures de vol). A cause d’une pluie annoncée, il a décidé d’avorter son vol.  Etant au dessus du lac, il a décidé de terminer son vol en faisant quelques exercices pour mieux connaître sa voile. Il planifie divers exercices dont une fermeture asymétrique. Après avoir tiré sur l’élévateur avant droit pour déclencher une fermeture latérale, sa voile reste fermée un peu comme si elle était cravatée. Comme il parvient à la stabiliser sans problème, il essaie de la sortir de cette configuration à plusieurs reprises mais sans succès. Il décide alors d’atterrir ainsi.

Nous remercions Robert d’avoir accepté de partager son expérience à la communauté ROCK THE OUTDOOR.

Petit exercice d’observation : ne lisez pas tout de suite l’article et observez bien sur la vidéo quel est l’élément qui maintient la demie aile fermée ? En deuxième partie de l’article, vous trouverez son témoignage après visionné la vidéo ainsi que l’analyse et les conseils de Jérôme parlant de ce fameux entonnoir mental qui réduit le champ de vision et les facultés d’analyse…

J’ai posé l’avion avec un moteur HS !

Il y a une semaine, je pilotais encore ma ancienne voile (géniale !!!) Mac Para Eden 5. Mais comme elle vieillit, j’ai décidé de passer sur une BGD Cure, aile de classe supérieure (allongement : 6.75), avec les recommandation de mon bon ami Nando : « tu vas adorer cette machine ».
J’ai passé 8 heures environ avec cette nouvelle voile et je me suis senti déjà très bien après moins d’une heure de vol. Ici, c’était mon 5ème vol et l’aile m’avait déjà « domestiqué », me sentant tellement mieux pour le vol de distance. On s’attendait à ce que la pluie arrive bientôt. Pour descendre, comme j’avais encore de l’altitude au-dessus du lac, je me suis dit que c’était le moment de vérifier les oreilles, comment ça rentre et sort en 360 et comment l’aile se comporte en fermeture asymétrique.
Et ce qui m’est arrivé m’a surpris et m’a donné un mal de tête tout l’après-midi en me demandant ce qui a bien pu se passer : qu’est-ce que j’ai fait de mal ? Devrais-je vendre la voile ? Devrais-je essayez à nouveau la fermeture asymétrique?  Non, car si cela se reproduisait ?

L’aile est restée simplement fermée et je n’ai pas pu la réouvrir, coincée comme une cravate. M. Manuel m’a dit pourtant que cette aile n’était pas sujette aux cravates et cela m’arrive dès la première fermeture en air calme ! J’ai essayé de tirer sur les suspentes du stabilo (et les autres – ce n’est pas marqué et pas facilement reconnaissable donc j’ai essayé les B ou C), pompant, peut-être pas assez, mais à chaque fois que j’essayais quelque chose, je virai immédiatement. J’ai stabilisé la voile et essayé de nouveau, je me suis remis à tourner, j’ai re-stabilisé…

Tirer le secours ? Un gars en SIV est mort ici il y a une semaine parce que personne ne l’a récupéré en bateau !

Je devenais un peu nerveux et commençais à me sentir un peu mal à l’aise. J’ai commencé à penser, pour la 2è fois de ma vie, à tirer le secours. Mais comme j’étais au dessus du lac et qu’un gars en SIV est mort ici il y a une semaine parce que personne ne l’a sauvé en le récupérant en bateau. J’avais toujours une altitude élevée et j’avais l’impression de pouvoir garder le cap (taux de chute 3 m/s). J’ai changé d’avis pour  la deuxième fois en décidant de ne pas tirer le secours : P….., je vais faire atterrir l’avion !
L’approche d’atterrissage était un peu différente, il y avait des voiles sur mon chemin et ma manœuvrabilité était très limitée. J’étais un peu court et les derniers mètres ont été un enfer. Mais cela s’est bien terminé.

Respect pour ce pilote qui :

  • envisage de faire quelques exercices avec la nouvelle voile qui’il vient d’acquérir : étant au dessus du lac, il planifie de faire les oreilles, fermeture asymétrique pour vérifier le contrôle du cap…
  • ayant une bonne marge en altitude, essaie de contrôler la situation : contrôle du cap
  • « paniqué », garde quand même son sang froid, décidant de ne pas lancer son secours et d’atterrir avec un « seul moteur »
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La cause de cette « cravate » et quelques mots sur l’entonnoir mental

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Après visionnage, j’ai vu que la solution était simple et accessible en quelques centimètres !

Entonnoir mental (ou effet tunnel) : ouvrir son champ de vision pour repérer le problème

Ai-je  tiré les élévateurs A vers le bas maladroitement ou y-t’il a un défaut de conception des poignées de direction C ? L’étiquette cousue le long de la sangle crée une zone d’accroche Peut-être que cela peut être amélioré ? Il peut toujours y avoir quelque chose dans laquelle la suspente peut se coincer et que, parce que vous êtes paniqué, vous ne remarquerez peut-être pas ? Un problème comme celui-ci peut probablement se produire sur n’importe quelle voile.

Sur la photo, on voit bien que la poignée présente des possibilités d’accrochage d’une suspente. Ce problème peut se produire aussi sur d’autres types de poignées des C.

Il est probable que ce problème n’aurait pas eu lieu si, pour tirer ses suspentes A vers le bas, Robert avait positionné sa main à l’extérieur.

Source photos : paragliding forum

Robert a été surpris par un comportement nouveau dû à une bricole (suspente A extérieure coincée derrière la poignée de pilotage). Cet élément nouveau l’a perturbé au point où il n’a pu analyser sereinement ce qui se passait. La hauteur, le maintien de cap, le comportement relax de la voile avec 35% fermé étaient des élements qui pouvaient permettre de résoudre le problème.

Cette vidéo est intéressante pour comprendre le comportement que l’on peut avoir si on est surpris, stressé…

On entre dans une sorte d’entonnoir mental et on n’arrive pas à prendre du recul, à analyser sereinement. On se focalise sur ce que l’on connait , ici c’est la cravate. Dans ce contexte, et ce n’est pas facile, on peut commencer par respirer, il n’y a plus aucune urgence, et surtout OUVRIR SON CHAMP DE VISION pour repérer le problème. On voit le problème sur les images à 1min30 . Le pilote a tout de même gardé son sang froid en décidant de poser dans cette configuration (oreille asymétrique maintenue). C’est une bonne décision.

Une remarque cependant concernant le contexte dans lequel le pilote décide de faire de nouvelles manoeuvres avec une nouvelle voile : temps dégradé, vent, pluie possible… Sa première idée de descendre aux oreilles ou 360° était plus adaptée je pense au contexte.

Un pilote extérieur ne pouvait pas voir le problème, surtout que la suspente s’est décoincée au freinage final.

Cette vidéo nous apprend beaucoup sur le comportement généré par du stress, la confiance qui en prend un coup. La vidéo est aussi un moyen excellent : en effet, pour le debrief, ce pilote retrouve des informations précises sur ce qui s’est passé. Il n’était non plus pas question de tirer son secours , la voile étant pilotable en ligne droite, le taux de chute peu important et des champs pour poser. L’histoire n’aurait pas été la même avec une arrivée dans l’eau sous le secours (sans bateau de récupération)…

Jérôme Canaud – Ecole Courant d’RDécouvrez le portrait de Jérôme

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ROCK THE OUTDOOR, la culture parapente