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“J’irai dormir avec mon parapente”, le premier bivouac de Seb

“J’irai dormir avec mon parapente”, le premier bivouac de Seb

Préparer son premier bivouac parapente en respectant des étapes

Sébastien Turay, créateur de Wingmaster, est un amoureux de la montagne depuis son enfance, et il l’apprécie plus particulièrement à la belle saison. Pratiquant le parapente depuis 6 ans à la Réunion, de retour en France depuis cette année, il a décidé de vivre sa première expérience de bivouac en parapente.

Si comme lui, vous aspirez au vol bivouac, inspirez-vous de sa première expérience : la préparation du projet, le choix du matériel, toutes les étapes à programmer pour y arriver en toute sécurité.

En effet, très influencé par les conseils prodigués par Jérôme Canaud sur Wingmaster, il a veillé à ce que toutes les démarches dans son projet se fassent par  étapes : “Je ne me suis pas mis dans le rouge ! J’ai gardé en mémoire le chapitre de Wingmaster de Jérôme Canaud qui explique ce rapport entre la prise de risque et la mise en danger…. Je ne suis pas allé tester les limites de mes capacités, j’ai toujours gardé une marge de sécurité.

Je suis un amoureux de la montagne. J’ai vécu toute mon enfance dans un petit village des Alpes à plus de 1000m, et l’été a toujours eu ma préférence. Les pentes herbeuses. Les forêts de conifères. Les sommets dégagés et leur vue imprenable sur le massif du Mont-Blanc. J’attends toujours les beaux jours avec impatience, pour aller respirer les parfums de l’été sur les innombrables sentiers de randonnées qui sillonnent les hauteurs de mon village de cœur.

Ces deux dernières années, je me suis à chaque fois encombré d’un sac à dos un peu plus conséquent contenant un parapente et une sellette. En version minimaliste : une excellente Susi d’AirDesign et une sellette Kortel Kruyer 2 accompagnée de son « Sak » airbag. Pas de secours pour plus de légèreté. Poids final : moins de 4kg dans le dos. Mon objectif était juste de descendre rapidement après l’ascension que j’avais généralement réalisée en mode « traileur » du dimanche. Light, efficace, génial pour marcher et descendre, et parfois profiter de bons créneaux d’ascendances.

Cette année, après de trop longues semaines de confinement, l’appel de la montagne a été encore plus fort. J’avais aussi en mémoire les incroyables images de la X-Alps et de ces athlètes parapentistes capables à la fois de gravir n’importe quelle pente, de décoller d’à peu-près n’importe où, d’atterrir dans bien pire, de dormir quelques heures en pleine montagne, prêts à recommencer le lendemain. Avec le rêve secret d’arriver un jour à faire la même chose, ou plus modestement d’en tirer une source de motivation et un objectif personnel : me déplacer sur plusieurs jours en autonomie avec ma voile.

En parcourant les réseaux sociaux, j’ai constaté que le marche et vol ouvrait désormais largement vers le bivouac parapente sur plusieurs jours, avec de plus en plus de pratiquants. En tout cas, ils sont de plus en plus nombreux à publier leur récit d’aventure.

Pour son premier bivouac parapente, procéder par étapes

S’inspirer du modèle Reason

Pour répondre à mon objectif de marcher, décoller, crosser, dormir dans la montagne, me poser, et recommencer, j’ai décidé de procéder par étapes. Étant aussi pilote d’avion, je connais le «modèle de Reason» que l’on utilise souvent pour expliquer les causes d’un accident, qui sont l’addition de plusieurs facteurs, jamais d’un seul. Pour se faire une idée, on représente ce modèle sous forme d’une succession de feuilles de papier dans lesquelles un trou représenterait un problème. S’il n’y a qu’un trou sur une feuille, pas de problème : c’est l’incident. Mais un petit trou dans chaque feuille conduit inéluctablement à l’accident. Chaque feuille de papier représente une « strate » d’un vol : état physique du pilote, psychologique, état du matériel, maîtrise de celui-ci, conditions météo, connaissance du site, etc.… Si on se met dans le rouge pour chacun des paramètres, on multiplie les chances d’accident.

Donc, pour ne pas créer des opportunités négatives, je suis pragmatique et je décide de tester chacun des ces « niveaux de sécurité » avant de me lancer dans le projet global de bivouac parapente. Je liste immédiatement les points problématiques pour cet été qui s’annonce magnifique : nouvelle voile, nouvelle sellette, nouvelle pratique, conditions de vol jamais rencontrées, trek en montagne. Je multiplie les inconnues et donc les risques potentiels. Je vais donc y aller par étapes.

Tester un parcours

J’en profite pour me rendre compte que les conditions d’été en métropole n’ont rien à voir avec celles de La Réunion où j’ai été formé et où j’ai volé principalement ces 6 dernières années. Il va falloir que j’accepte d’être tiré par les bretelles et me retrouver à des altitudes et des hauteurs/sol jamais encore rencontrées.

Si j’ai pris de l’assurance avec ma voile et ma sellette, je n’ai pas encore essayé le cross de longue distance, ni la nuit en montagne en solo avec le matos et retour dans la vallée. Ma prochaine étape sera donc de tester un parcours : marche, bivouac en autonomie, vol de retour. C’est l’objet de la vidéo que j’ai réalisée sous forme de banc d’essai.

Pour le bivouac parapente, je parcours les forums parapente pour découvrir les expériences des uns et des autres. Il me faut du matériel light. Je tombe sur deux super sites spécialisés faisant partie du même groupe : monbivouac.com et aventurenordique.com. Plus spécialisés encore que le vieux campeur, ils proposent du matériel light de très haut niveau.

Son matos pour le bivouac parapente

Ma voile et ma sellette

Ne partant pas très loin en vacances, je décide de transformer mon budget voyage en budget matos de bivouac light.

Ma nouvelle voile est une Soar d’AirDesign, légère et compacte (3,7kg pour 26m²) idéale pour marcher, et un petit bijou avec d’incroyables capacités en thermiques. J’ai pu l’essayer sur de petits marche et vol à la journée. C’est un ascenseur !

Ma nouvelle sellette est une KORTEL Kruyer 3, un peu plus lourde que la 2, mais largement plus confortable en vol, et avec un « Sak » volumineux où je pourrais glisser le matériel pour bivouaquer.

Pour la tente, j’ai choisi une Neo Hornet Elite 1 place de 800 grammes ! Une tente qui se monte en moins de 5 minutes avec une structure autoportante supportant une moustiquaire principale et un toit de protection en toile de parapente Ripstop d’un jaune un peu voyant à mon goût… mais à la fois idéal pour se faire repérer par des secours. Au cas où…. Je rajoute un petit tapis de sol Nemo Foot print qui permet de protéger le dessous de la tente sur des surfaces abrasives et ne pèse que quelques grammes.

Pour le sac de couchage, je cherche ce qui se fait de plus light, sachant que je vais principalement l’utiliser à la belle saison. Mon choix s’arrête sur Sea to Summit Spark SP 0 donné pour 14° d’utilisation optimale et -2° en extrême. Poids de l’engin : 260 g en version L et compressible dans le volume d’une demi petite bouteille d’eau !
Au pire, comme le dit mon ami Jérôme Canaud : « si tu as froid, tu t’enroules dans ta voile ! ». Je me rappelle d’ailleurs l’avoir croisé, dormant à la belle étoile à l’abri d’un rocher sur les pentes du Piton des Neiges à la Réunion, à 2500m d’altitude, à 3h du matin, enroulé dans sa Pi2, alors que, de mon côté, j’avançais péniblement vers le sommet que j’espérais atteindre avant le lever du soleil.

Pour le matelas, j’ai fait le choix un peu audacieux d’un Kymit Inertia X-Frame, un matelas gonflable de 241g (là encore priorité au light) et surtout aussi petit replié que mon sac de couchage compressé. Intéressant. Sa conception est originale. Selon son fabricant, il est basé sur le « body mapping. Il offre du confort uniquement sur les zones sollicités pendant le sommeil. ». Autrement dit, le matelas est light car il est composé de boudins et de « trous ». On est censé dormir sur les boudins, les trous étant les parties inutiles que le corps ne touche pas. Je vous laisse découvrir dans la vidéo de mon aventure, les résultats de la nuit passée sur ce matelas concept.
Le problème n’est pas tant le confort du matelas qui se glisse dans le sac de couchage que le froid du sol qui remonte pendant la nuit à travers les fameux trous. Un matelas à réserver pour la plaine les soirs d’été bien chaud. A 2000m, avec l’humidité qui remonte, il vaut mieux oublier.
J’ai ultérieurement opté pour quelque chose de plus efficace, et à peine plus lourd (mais moins compact, certes), les 340g du NeoAir Xlite de Therm-a-Rest, qui a l’avantage d’être très confortable, de se gonfler très rapidement avec un sac externe fourni et d’avoir des couches thermo-réfléchissantes internes qui permettent d’être bien au chaud, même à plus de 2000m sur un terrain humide. En tout cas pour ce premier essai de bivouac parapente, j’ai bien senti l’utilité d’un matelas gonflable « entier ».

Poids total : tente + sac couchage + tapis de sol + matelas : 1,2 kg

Mon premier test de vol-bivouac parapente

C’est au col de Véry, entre Savoie et Haute-Savoie, que j’ai décidé de faire ce test de vol-bivouac parapente. Ça commence par une marche d’environ de 2 heures pour passer de 1500 m à un peu plus de 2000 m, sur un petit sommet, hors sentier, avec vue à 360° sur le massif du Mont-Blanc, un petit bout de la vallée de l’Arve, la plaine reliant Praz/Arly à Megève, les Aravis, la vallée d’Albertville, Les Saisies et les vallées environnantes, un point de vue extraordinaire qui s’enflamme au coucher du soleil, un endroit inhabité mais pas exempt de toute construction, comme vous le verrez en image.

La tente est montée ultra-rapidement, le matériel pour dormir déployé à la vitesse de l’éclair. Je peux attendre tranquillement la nuit et la pluie d’étoiles filantes. Nous sommes à l’époque des Perséides. Je ne serais pas déçu par le spectacle intense d’un ciel du mois d’août exceptionnel.

Je vous passe les détails sur ma courte nuit bivouac parapente : altitude + froid + matelas à trou…(même s’il faisait encore 20 degrés à 20h à 2000m la veille, le froid relatif et l’humidité arrivent finalement pendant la nuit). Bilan final : 2 heures de sommeil environ. Un peu juste pour envisager un cross au réveil… Ça tombe bien, mon objectif est juste de redescendre dans la vallée.

Cliquez sur une photo pour visualiser le diaporama

Il est 6h30 quand le soleil fait son apparition derrière le Mont-Blanc. Je me réchauffe immédiatement. J’avale une barre de céréales et un paquet de beef jerky (pour les connaisseurs) et je repère l’endroit idéal pour décoller. Je peux partir dans n’importe quelle direction : le vent est nul, une micro-brise monte déjà du nord. J’attends que le soleil illumine totalement la vallée pour que la brise, même légère, s’inverse et soit plutôt dans le sens remontant que descendant.

A 7h30, je range le matériel de bivouac dans mon « Sak » sans aucune difficulté. Je suis loin du PTV max de 105 kg préconisé par AirDesign. Vent nul. Je partirais dos voile sur une pente assez plate pour prendre le temps de sentir le gonflage et voir si je peux courir avec le matériel dans le sac-airbag… 7h45, la Soar gonfle parfaitement avec très peu d’action comme d’habitude. Je ne sens même pas le sac dans mon dos. Je poursuis ma course sur le faux plat descendant et, dès que j’ai pris un peu de vitesse, je m’oriente tout de suite vers la gauche dans la combe herbeuse sous le col de Véry. Direction Praz/Arly. Le vol est calme et magnifique, au plus près du relief. 15 minutes de vol au petit matin, magique, sous le lent ballet de 3 montgolfières qui viennent de décoller.

Je me dirige vers Megève mais je suis déjà assez bas et sans activité thermique, je dois viser les pentes en hauteur plutôt que le bas du village. J’hésite à me poser dans un champ inconnu. En haute-saison, les agriculteurs sont assez sensibles sur le respect des pâturages. Je fais demi-tour et aligne la plaine de Praz/Arly avec son atterrissage officiel (assez court et parfois turbulent) et son champ « de secours » accessible et qui a été récemment coupé (pas de risque de me prendre un coup de fourche). Avec seulement 2 heures de sommeil, c’est finalement le bon choix et je me pose avec sérénité.

Pour ce premier vol bivouac parapente, je ne me suis pas mis dans le rouge !

Après avoir replié mon matériel, je remonte encore pendant une heure vers ma voiture garée plus haut pour finir mon petit périple. Je fais le bilan très positif de cette belle expérience : je ne me suis pas mis dans le rouge. J’ai fait évoluer ma pratique par étape.

J’ai testé mes limites en dépassant juste ce qu’il fallait pour progresser sans me mettre en danger. J’ai gardé en mémoire le chapitre de Wingmaster de Jérôme Canaud qui explique ce rapport entre la prise de risque et la mise en danger. Si je m’étais lancé directement dans l’aventure d’un vol-bivouac au long cours sur plusieurs jours avec du nouveau matériel, avec peu d’expérience sous une nouvelle voile, avec le cumul de la fatigue, j’aurais pu commettre de nombreuses erreurs. Et me mettre en danger.

Je ne suis pas allé tester les limites de mes capacités, j’ai toujours gardé une marge de sécurité. J’ai pu voir ce qui allait et n’allait pas, améliorer mon confort et mes sensations. La fatigue étant un élément important, surtout lorsqu’on se retrouve en l’air. Au final j’ai pris beaucoup de plaisir. Prochaine étape, la même aventure sur plusieurs jours, et pourquoi pas la traversée des Alpes, version X-Alps, dans quelques années ?

ROCK THE OUTDOOR, la culture parapente

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