• Home
  • /CONSEILS
  • /Il s’acharne à défaire une cravate en restant en autorotation
Il s’acharne à défaire une cravate en restant en autorotation

Il s’acharne à défaire une cravate en restant en autorotation

Ce genre de comportement et d'images me mettent facilement en colère !

Tels sont les propos de Jérôme Canaud lorsque nous lui avons transmis cette vidéo. Ce pilote australien volant dans la région de Manilla en Australie n’a certainement rien à faire sous cette aile de catégorie C (ou D pour la petite taille) ni à voler dans ces conditions, certainement trop fortes pour son niveau. En effet, avant même l’incident, on constate qu’il n’a mené aucune action pour anticiper la situation dans laquelle il s’est trouvée (trajectoire, montée vers le nuage,…). Et pendant l’incident, il ne fait absolument rien d’efficace pendant 3 minutes : il a fait 2 fois une action (coups de frein) en 4 minutes. Heureusement pour lui qu’il avait du gaz pour se sortir de cette situation…

Cliquez ici pour avoir une idée du temps passé pour réaliser cet article

travail-incident-cravate

Commentaires sur la légende
– Recherche : recherche documentaire, vérifivation des sources…
– Rédaction : rédaction, réécriture, synthèse, relecture…
– Rédaction tiers : rédaction réalisé par un rédacteur autre que l’auteur habituel
– Relations avec tiers : échanges avec des personnes pour construire l’article (conseils, vérifications d’infos…)
– Composition : mise en page, redimensionnement des photos
– Traduction : traduction et synthèse des témoignages du pilote

Synthèse des commentaires du pilote Toby

En plusieurs années de vol, je n’ai pas eu à faire face à une situation comme celle-ci donc il m’a fallu du temps pour évaluer et agir. Je savais que l’altitude était de mon côté, donc je n’ai pas paniqué.
J’étais concentré pour enlever la cravate plutôt que d’essayer de sortir de l’auto rotation pour revenir en vol droit. J’essayais d’attrapper la suspente du stabilo mais les suspentes n’étaient pas tendues et il m’a fallu du temps pour m’assurer que j’avais la bonne suspente. Une fois que je l’ai attrapée, cela n’a pas fait grand chose. J’ai passé la suspente dans mon autre main pour avoir une meilleure prise de la suspente. Mais cela n’a rien changé du tout. J’ai abandonné l’idée du stabilo. J’ai pensé alors à décrocher. Quand j’ai appliqué le frein sur le côté volant avec l’intention de décrocher, la cravate est sortie assez brusquement. Après la situation s’est inversée. Un bon pompage sur le frein a éliminé la cravate.

Pour visionner la vidéo, cliquez ici

horizontal break

Analyse et conseils de Jérôme Canaud

horizontal break

Contexte

Pilote en cross en région de plaine. Les conditions sont généreuses voire très généreuses au niveau thermique (plafond vers 3500m, beaux cumulus, très bons varios). Le pilote vole sous une voile de performance récente EN C (voire EN D suivant la taille).

Chronologie

La vidéo commence quand le pilote finit d’enrouler et commence une ligne droite pour transiter. Il est quasiment au plafond, ça continue à monter et son objectif a l’air d’être de sortir de cette ascendance avant de se faire prendre dans le nuage.

D’autres pilotes sont en dessous et vont dans la même direction. Un pilote est devant lui, quasiment à la même hauteur, avance aux oreilles pour sortir de l’ascendance sans monter dans le nuage.

Le pilote décide d’accélérer (moitié, plus ?) et pilote aux élévateurs AR. Première fermeture à 58″ (2 grosses oreilles). Réouverture de l’aile avec, il me semble, l’accélérateur toujours actionné et utilisation des freins.

Le vol accéléré continue, le vario s’accélère et s’ensuit une nouvelle fermeture suivie d’une réouverture brutale puis d’une fermeture en masse par le centre à 1’30. provoquant une crevette qui cravate rapidement. Il n’y a pas d’action pilote.

La voile cravatée avec 40% de tissu coincé part en autorotation entrainant des twists (1 tour). Il s’ensuit une autorotation à 1’56 (sans twist du pilote) d’une minute avec une perte d’altitude avoisinant les 1000m SANS ACTION PILOTE (ou avec une mauvaise action inefficace)!!!!

A 3’10, le pilote actionne le frein (gauche) opposé à l’autorotation, ça part en décrochage puis en vol droit avec la cravate initiale enlevée et une nouvelle petite cravate à gauche. La voile est en vol droit puis repart en autorotation cette fois à gauche avec toujours aucune action du pilote !!! Cette nouvelle autorotation fait encore perdre au pilote 200m avant qu’il agisse sur le frein opposé droit, l’autorotation s’arrête, puis le pumping coté cravaté chasse la cravate.

La voile cravatée avec 40% de tissu coincé part en autorotation entrainant 1 tour de twist

La voile repart en autorotation cette fois à gauche

Les 2 autorotations auront duré 2min30 avec 1000m de perte d’altitude !

Les questions que cela amène et pistes de réflexion

1) L’anticipation avant d’arriver au plafond pour tenir compte du fait qu’en s’approchant de la base du nuage, l’ascendance va accélérer (condensation, dégagement de chaleur). Tenir compte que la ligne droite pour continuer son vol va se faire en montant dans ce cas vu la taille de la zone ascendante. Il est donc judicieux d’arrêter d’enrouler bien avant d’être au plafond, pour avancer puis enrouler si nécessaire en bordure du nuage.

2) Le pilotage adapté pour faire une ligne droite dans une aérologie turbulente, ascendante sans monter : oreilles + accélérateur + pilotage aux élévateurs AR.

3) La trajectoire adaptée pour éviter de rester sur une ligne droite montante et la choisir la plus courte pour ne pas rentrer dans le nuage. Si cela ne fonctionne pas, le pilote devra passer par la case descente rapide pour se replacer plus bas et reprendre sa ligne droite (par ex :360° + une oreille ext).

Le pilote s’est laissé monter sans anticiper. Voler accéléré n’était ensuite pas suffisant pour avancer et descendre.

4) Analyse de la situation et pilotage adapté pour résoudre le problème. Suite à la fermeture puis cravate importante, la seule action pilote pouvant résorber l’incident consiste à commencer à contrer aux freins pour arrêter (ou diminuer la vitesse) l’autorotation PUIS DE DECROCHER COMPLETEMENT SYMETRIQUEMENT (full stall) afin de se retrouver en « marche arrière » qui permettra de chasser le bout d’aile coincé. Il est parfois nécessaire de faire plusieurs décrochages. Il est bien sûr préférable que cette manoeuvre soit maîtrisée donc apprise en amont lors de stages de pilotage en milieu sécurisé.

Ce qui est surprenant, c’est que le pilote accepte 1 minute d’autorotation sans faire aucune action pour l’arrêter (frein à gauche). Ou il tente une technique inadaptée pour ce type de cravate c’est à dire tirer sur la suspente de stabilo coté cravaté. Peut être est-ce la seule technique que le pilote connait, ou pense-t-il que c’est la bonne?

Conclusion et avis personnel

Il y a un important décalage entre le niveau de la voile et les compétences techniques et théoriques du pilote. Ici on met ce décalage dans une aérologie forte. Le cumul de ces 3 aspects nous amène à une situation pouvant être catastrophique.

J’espère que le capital confiance du pilote n’a pas été trop touché et qu’il pourra débriefer cette expérience afin de continuer à voler et se faire plaisir.

Il est sûr que se former en pilotage, analyse des conditions, tactique de vol en cross et revoir ses connaissances théoriques semblent être le minimum pour que ce pilote vole sereinement.
Se questionner sur le niveau requis pour piloter cette voile de performance par rapport à ses compétences techniques et théoriques du moment est aussi primordial.

Jérôme Canaud

ROCK THE OUTDOOR, la culture parapente

horizontal break
horizontal break

SOUTENEZ ROCK THE OUTDOOR

en devenant Membre PREMIUM et accédez aux articles réservés (conseils, tests matériel, rubrique voltige…) et à de nombreux avantages (magazine numérique, remise boutique…)

Laisser un commentaire