Le témoignage du pilote

Tout d’abord, je dois préciser que j’ai volé avec une sellette totalement déréglée et dans une position trop allongée. En effet, les réglages de ma sellette se sont désserrées dans mon sac à dos.

Après une demi-heure de vol très inconfortable et, arrivé à l’altitude de 2700m, j’ai rencontré un gros changement de direction de la masse d’air. J’ai donc pensé à atterrir pour ne pas continuer à voler dans ces conditions. Après une tentative de descente et à cause de mon pilotage inadapté, cela a provoqué une forte abattée que je n’ai pas géré correctement.

Pendant l’incident, 2 suspentes A se sont coupées en marche arrière (nouvelle voile avec 1 année d’utilisation et moins de 50 heures). Je ne savais pas que les suspentes avaient été coupées car j’étais suspendu. Et j’ai mis trop de temps pour libérer le parachute de secours.

En résumé : mauvaise position dans la sellette, mauvaises réactions de pilotage face à des matéraiux défectueux (suspentes).

L’analyse et les conseils de Jérôme Canaud

Ce pilote n’a pas pris le soin de régler sa sellette et le cale-pieds au sol, ni même en vol. Semblant en excès de confiance, il n’a pas pensé adopter une position adéquate dans sa sellette face à une masse d’air devenue turbulente. Le mauvais réglage sellette + calepieds+ commandes non tenues ont favorisé la cascade d’incidents. Découvrons les observations de Jérôme à propos de ses erreurs et négligences…

Jérôme Canaud lors d’une session WINGMASTER

– Son cale-pieds est mal réglé, beaucoup trop long, donc le pilote est sur la pointe des pieds, ce qui doit enlever un peu d’appui lombaire dans la sellette. Pourtant, un cale-pieds peut se resserrer assez facilement en l’air normalement.

– C’est certainement un bon pilote, mais un peu en excès de confiance car il ne tient pas ses commandes : sa main n’est pas dans la poignée, pas de prise en dragonne, pas de 1/2 tour de frein. Le risque est de la perdre sur une grosse turbulence, surtout vu les conditions thermiques très généreuses !

– Il cherche à descendre en spiralant dans une zone qui monte. Peut être qu’en faisant une ligne droite pour sortir du thermique lui aurait facilité la tâche pour descendre.

– Je pense qu’il sort de sa spirale plus tôt, le thermique étant plutôt consistant, ça le sort de sa spirale, donc il se retrouve plutôt en ressource avec beaucoup de frein. Il souhaite continuer à tourner, donc du avec du frein en plus. Dans le contexte « déjà freiné + ressource », il décroche à droite et c’est le départ en vrille.

En excès de confiance, les commandes peuvent lui échapper à tout moment. Pour les garder pendant l’incident, il n’a pas d’autre choix que de bien les tenir avec le risque d’appuyer trop dessus et de produire un sur-pilotage…

Ensuite, c’est classique, il appuie sur les freins, donc surpilotage. Alors, il reste hors du domaine de vol et c’est le décrochage. A aucun moment, il remonte les mains, donc la voile n’a pas la possibilité de revoler. Son déséquilibre dans la sellette accentue encore tout cela en plus de l’appui sur les freins.

– A 58 secondes, il a une grosse abattée avec fermeture frontale et réouverture violente, ce qui casse 2 suspentes avant. J’ai du mal à voir si ce sont les hautes qui cassent ou les basses. Les basses, c’est peu probable. Les hautes, c’est possible, soit sur une réouverture très brutale (le freinage) ou par frottement les unes sur les autres.

– Le pilote arrive quand même à faire 40 secondes d’autorotation twistée en voyant la voile déformée (suspentes cassées). On sait qu’il n’a pas compris que deux de ses suspentes ont rompu. A 1,05 min, la situation est devenue IRREVERSIBLE (voir tours de twists avec élévateurs décalés)  ! Le pilote ne doit pas s’en rendre compte car il continue d’essayer de se battre, de freiner. Dans ce cas, le secours doit être tiré tout de suite !

Jambes tendues dans le cale pied avant ou pendant l’incident à éviter : Masse d’air turbulente = bonne prise des commandes et position regroupée avec jambes croisées !

Conseils de Jérôme Canaud

Réglages

Ce qui m’étonne, c’est que ce bon pilote met sa sellette sans vérifier au moins le réglage de ses hanches (ses réglages ont changé dans le transport), voire qu’il ne cherche pas à régler sa sellette en vol, si elle est aussi mal réglée.

Position dans la sellette en cas de turbulences

Son pilotage, sa position sur le cale-pieds, la prise des commandes ne sont pas adaptées à l’aérologie du moment. Fuir la zone ascendante aurait été plus efficace que de descendre dans du thermique fort.

Posture et pilotage

J’émets l’hypothèse que ce pilote ne se rend pas bien compte de l’adéquation nécessaire de son pilotage avec la masse d’air qu’il exploite. Il me semble très, trop confiant dans sa posture et sa manière de faire au début.

Surpilotage

Il est ensuite complètement dépassé. Il pouvait, dans ce genre de sketch, lâcher son appui cale-pieds très marqué pour se regrouper, pieds croisés sous l’assise. Il reste sur son cale-pieds jusqu’au contact avec le sol !!!?? Je m’interroge sur son réel niveau technique du moment et de la conscience qu’il a des conditions dans lesquelles il vole !

Suspentes

Ensuite des suspentes même neuves, peuvent casser (hautes, intermédiaires) par frottement après une réouverture brutale du bord d’attaque. Cette réouverture a d’autant été brutale que le pilote a subi une grosse abattée avec sûrement une détente du suspentage !!!

On ne peut espérer que cette vidéo le fasse percuter, lui fasse tenir ses commandes, régler sa sellette et son cale-pieds, et tenir compte des conditions. Il a de la chance de poser juste à coté d’un caillou dans la pente.